lundi, mai 23, 2011

Le chemin du retour





Dans ce village où j’étais né, où tous mes amis sont nés, on a comme coutume de quitter le village à l’âge de sept ans, pour aller dans la forêt.
C’est comme une tradition de notre tribu, pour que les garçons acquièrent la maturité pour qu’enfin deviennent des hommes, mais cette expérience n’a rien d’amusant, ça ne ressemble pas à vos promenades de dimanche dans les bois, sauter, bondir, courir, respirer l’air pur de la nature.
Ici loin de vos jeux organisés, on va à la dérobée chercher à manger et à boire, pour qu’après on se réunisse avec quelques amis au feu du bois le soir.
C’est vrai qu’avec des amis nous avons quitté le village ensemble, mais chacun passe sa journée à part, chacun choisi son chemin, et on se fixe des points de rencontre le soir.
On s’éloigne de plus en plus de notre village, et le danger devient de plus en plus présent et féroce, mais le plus grand danger c’était de se perdre, ici on ne peut pas tâtonner, une déviation d’un petit angle, vous guide vers un autre monde, une autre vie, et souvent on remarque qu’on perd des amis au fil du temps.
J’ai eu l’habitude de mettre des pierres pour retrouver mon chemin de retour, j’ai toujours eu l’espoir de retourner le soir, j’espérais que mes amis en fassent autant.
On s’échange quelques expériences, quelques découvertes entre amis, mais ce n’est pas toujours évident de transmettre ses pensées à ses amis, car pour eux ce que tu racontes ce ne sont que des histoires de chasse.
Mais au lever du soleil, chacun pour soi, chacun découvre des nouvelles choses, des nouvelles créatures qui ne sont pas toujours anodines, tout faux pas, tout excès de zèle serait sévèrement puni.
Au début, et dans la fougue de la jeunesse, l’expérience était amusante, on apprenait plein de choses en peu de temps, mais avec le temps, on se sent fatigué, délaissé, on veut retourner aux bras de notre mère ou en l’occurrence aux bras d’une femme, comme dans le complexe d’Oedipe.
Je suis allé loin, trop loin, aussi loin que j’ai pu, mais là je veux rentrer à mon village, retrouver mon ours en peluche, retrouver mon chien qui est surement mort à l’heure qu'il est, je veux revoir ces sages du village qui viendront un peu de partout pour me voir revenir.
Je hâte de rentrer, moi le sauvage, moi le rebelle, pour donner à ma famille de mes nouvelles, leurs raconter tous mes voyages, et que j’ai bien suivi leur sillage, mais ça fait tellement longtemps que j’ai quitté, je ne me rappelle plus du chemin, et c’est là que je demande à mes amis « vous rappelez vous, du chemin de retour ? ».